lundi 31 mars 2008

Fire walk with me

Cher journal,
Aujourd’hui j’avais rendez-vous avec James. On a fait l’amour, mais après il était bizarre, comme si ça ne lui avait pas suffi. Comme à chaque fois que je le vois, il m’a dit qu’il m’aimait, qu’il voulait me sauver, que je devais arrêter de voir Bobby et de sortir toute seule le soir. Je crois qu’il ne sait pas qui je suis en réalité. Personne ne me connaît, et lui encore moins. Il en deviendrait fou, s’il me voyait réellement…
Donna non plus ne sait pas qui je suis. Elle m’a dit qu’elle voulait venir avec moi ce soir au Road House, mais je n’ai pas envie. Je ne veux pas qu’elle soit comme moi. Si elle me ressemblait, je n’aurais plus personne de tendre à mes côtés. Je ne veux pas qu’elle vienne, et qu’elle me voie comme ça… qu’elle me voie dans les bras d’hommes que je ne connais pas et qui me donnent pourtant ce dont j’ai tellement besoin.
Je m’éloigne de Bobby, chaque jour un peu plus. Il se doute pour James, mais il n’a encore aucune preuve. Après tout James est bien peu de choses… une goutte d’eau dans mon océan d’hommes.
Je sais enfin qui est Bob. Je sais qu’il me veut, et que je ne lui donnerai rien. Je sais qu’il va me détester. Je sais qu’il m’aime autant qu’il me hait. Je sais que je vais mourir par sa main, une main qui m’a donné la vie il y a seize ans. Parfois je me demande si je n’ai pas rêvé tout ça, si je n’ai pas simplement peur d’un homme qui veut faire de moi une vraie femme, alors que je voudrais rester sa petite fille. Je ne peux pas croire que ce soit lui qui vient la nuit dans ma chambre, qui hante mes cauchemars, qui me baise parfois. Il faut que ce soit Bob, et pas lui.
Je n’ai pas peur de me brûler. Je sais jouer avec le feu. Même si la princesse se fait toujours baiser.
Laura.

mercredi 26 mars 2008

La fidélité

Ils se regardent, si proches l’un de l’autre, elle à droite du canapé, lui à gauche. Une seule place vacante entre eux deux. Quelques petits centimètres qui ne devraient pas avoir d’importance. Et pourtant, on dirait qu’un océan entier les sépare.
Son regard à lui accuse. Il n’a pas d’indulgence. Il la regarde, la méprise. Le plus fort qu’il le peut. On voit bien qu’il se force mais tout ça n’a aucune importance : l’essentiel est qu’elle se sente mal, qu’elle comprenne qu’elle a mal agi.
Elle baisse la tête, regrette d’être obligée de faire amende honorable, mais ne sait pas comment réagir autrement. Enfin elle se lance. Ce silence ne règle rien.
« Arrête de me regarder comme ça ! Je ne t’ai jamais menti, je croyais que c’était l’essentiel. »
Rire sarcastique de l’homme. Il jette la tête en arrière, on dirait qu’il cherche à la séduire dans son sadisme.
« L’essentiel ? Je ne sais pas dans quel monde tu vis, Claire. Je ne sais pas de quelle planète tu débarques. Ici on aime les gens, on essaie de ne pas leur faire de mal, et quand on est amoureux la fidélité elle va de soi. »
C’est au tour de Claire de rire.
« Tu crois que j’ai envie de faire comme les autres ? Tu crois qu’une attitude est bonne parce qu’elle est celle de la majorité ? Je ne suis pas comme ça, je te l’ai toujours dit. C’est comme ça que ça a commencé entre nous : tu étais ivre, moi beaucoup moins que toi, et tu as couché avec moi après t’être fait sucer par une de mes amies. Ça ne t’a pas gêné, à l’époque. Les leçons de morale sonnent faux dans ta bouche, tu le sais bien.
-Il ne s’agit pas de morale. Il s’agit d’amour. Je ne crois pas que tu m’aimes quand tu vas baiser avec n’importe qui. Et moi je veux une femme qui n’aime que moi et ne se donne pas au premier venu, comme une vulgaire pute. »
Claire attendait ce signal : dès que le mot « pute » est lâché, elle sourit. Elle ne baisse plus les yeux.
« Tu me dois vachement d’argent, alors, si je ne suis une pute. Et n’oublie pas que la sodomie, c’est deux fois plus cher. »
Il ne sait pas comment réagir. Il sait qu’il a tort. Il sait qu’il essaie de jouer les grands hommes, mais qu’il n’a pas de réponse à lui donner. Il sait qu’il l’a prise comme elle était, qu’elle n’a jamais menti, que c’est lui qui est blessé dans sa virilité. Qu’il ne supporte pas de la voir ne pas lui appartenir. Une femme n’est pas un objet. Sa femme n’est pas son objet. Claire va le quitter.
« Je n’aurais pas dû dire ça. Mais tu as très bien saisi l’idée.
-Je ne serai jamais fidèle. Je ne serai jamais celle que tu recherches. Tu ferais mieux de t’en aller. »
Il la regarde. Il sait qu’au-delà de ses grands discours, il y avait une chose qui les liait : le désir. Il la désirait, et elle le désirait. Au bord du précipice, il sait qu’il a encore envie d’elle. Peut-être même que l’idée d’autres hommes glissant sur elle l’excite encore plus.
Gauchement, il s’approche. Il veut jouer le jeu des gestes maladroits, hasardeux, qui n’ont pas l’air d’avoir été voulus ni réfléchis. Claire l’a tout de suite compris. Elle le repousse et se déshabille.
« Je t’assure que cette fois, t’en auras pour ton argent. »